L’homme qui taxait aux dépens des chevaux
L’homme qui taxait aux dépens des chevaux
par Dr Anne Halimi
Faire descendre les centres équestres dans la rue, c’est inédit. Une première peut-être même dans la grande Histoire de France.
Et pour réaliser ce petit miracle : le passage d’une TVA de 7 à 20% pour tous les centres équestres et ce, dès l’année prochaine ! Une nouvelle taxe qui donne envie de mettre un grand coup de sabot dans le tas parce qu’elle laisse le sentiment d’un incroyable gâchis…
Mais d’abord l’équitaxe, c’est quoi ?
Encore une taxe inventée par notre Président normal ? Non ! Ca ne serait même pas de sa faute… C’est celle de l’Europe ! Si, si !
Enfin, en tout cas, c’est ce que nous expliquent les Ministres, les Secrétaires d’Etat et toute leur armada de conseillers.
Eux, ils aiment bien les chevaux, mais c’est cette vilaine Europe qui les oblige à taxer…. Et s’ils ne le font pas, la France risque de payer des pénalités…
Cette « excuse » ne fait pourtant pas l’unanimité et a récemment été remise en cause par une centaine de députés et sénateurs de tout bord – on compte parmi eux Chantal Jouanno mais aussi Jean-Vincent Placé…
Selon ces derniers, l’Union Européenne garantirait bien aux sports équestres l’éligibilité à un taux de TVA réduit… Mais, sans même entrer dans ce débat d’experts juridiques, il me semble tout de même que le Gouvernement n’a pas toujours peur de ces fameuses menaces financières proférées par l’Europe.
Permettez-moi une petite digression et prenons l’exemple de la pollution de l’air extérieur.
La législation oblige depuis 2005 les pays de l’Union à ne pas dépasser certaines valeurs limites en ce qui concerne les microparticules. Valeurs que la France dépasse toujours allégrement.
Pour 2014, l’hexagone s’expose donc à une amende de 11 millions d’euros et à des astreintes journalières d’au moins 240 000 euros par jour, et ce, jusqu’à ce que la qualité de l’air soit respectée.
Mais, sur cette question, pas de taxes, pas de politiques de changement, rien. Ca roule… Nos dirigeants semblent visiblement moins concernés, moins pressés…
Pourquoi ? Peut-être que les chevaux fiscaux et les chevaux sous le capot font plus peur à nos représentants que les petits poneys dans leurs champs…
Pourtant, le secteur équestre, s’il ne pèse certes pas financièrement aussi lourd que celui de l’automobile, occupe le premier rang des employeurs du secteur sportif avec 62 000 emplois.
Cette nouvelle taxe risque donc bien de faire quelques chômeurs de plus…
En effet, les cours coûteront plus chers et de nombreuses familles, notamment les moins aisées, seront obligées de renoncer…
Cela va aussi avoir un effet sur le prix des pensions de ceux qui ont des chevaux dans les centres équestres. Certains seront obligés de les vendre, d’autres de les faire abattre…
Moins de clients, moins de chevaux, moins d’emplois : payer plus, pour faire moins. Beau slogan.
Mais, au-delà de ça, ce qui m’énerve le plus, c’est la négation par cette taxe de toute une filière humaine qui valorise au quotidien l’environnement et la santé dont on nous parle tant et pour lesquels on fait si peu – la preuve.
En effet, le cheval, ça n’est pas simplement un secteur économique. Le cheval, c’est d’abord une façon d’appréhender l’environnement.
Dans un monde particulièrement industrialisé, où les milieux ruraux peinent à se maintenir en activité, les centres équestres font un travail formidable d’intégration sociale et de préservation des milieux.
Le cheval, c’est aussi une façon de soigner.
Certes, l’équitation est un sport, et on connaît tous les bienfaits du sport pour la santé, il n’y a pas de discussion là-dessus. Mais c’est aussi une thérapie.
Des nombreuses expérimentations ont été menées et ce, depuis 1952. A cette date, une cavalière danoise décrocha une médaille d’argent en dressage aux Jeux Olympiques après avoir surmonté une poliomyélite en partie grâce à l’équitation.
Mais, au-delà de la rééducation fonctionnelle des personnes ayant un handicap moteur, ces dernières années ont permis de mettre en évidence les bienfaits de la pratique du cheval sur l’état de santé des personnes ayant un handicap sensoriel ou mental, ou des pathologies psychiques.
En un mot, le cheval, c’est une passion. Et si je vois bien que la passion du gouvernement est visiblement de taxer, la seule Europe ne me semble pas justifier l’envoi de tout un secteur à l’abattoir…
Alors si je pouvais murmurer à l’oreille de nos gouvernants, je crois que je leur dirais qu’il est grand temps de montrer qu’ils en ont sous le capot.
Source photo : Délirius Leur page facebook ici, leur site là